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Space News InNet 168a




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Space News InNet numero 168a                        mardi 23 septembre 1997


Numero special : Les comptes da la station spatiale

Partie 1

Devant une commission d'enquete du Congres americain, le  general  John  R.
Dailey, directeur delegue de la NASA,  declarait  en  juillet  1995  :  "La
survie meme de la station spatiale repose sur le succes de la  NASA  et  de
ses fournisseurs a controler et a reduire les depenses... ".

Un an plus tot, en aout 1994, la NASA avait confie le role de  coordinateur
de la  station  spatiale  a  Boeing  -  jusqu'alors  un  contractant  parmi
d'autres. Or en avril 1995 le geant de Seattle  s'etait  vu  condamner  par
l'administration federale a une penalite de 75  millions  de  dollars  pour
"avoir surestime les couts factures a l'administration... Dans  les  annees
1980 ecrivaient les procureurs federaux, Boeing a entrepris des  recherches
tres  couteuses  sur  l'intelligence  artificielle  et   ses   applications
potentielles aux robots spatiaux du futur, aux systemes de  maintenance  de
la station spatiale, aux appareillages  de  commande  et  de  controle  des
avions militaires, ainsi qu'a d'autres applications informatiques."

Au cours de l'audition du 27 juillet  1995  le  representant  John  Dingell
(democrate) a lu a haute voix ce rapport : "Depuis sa creation en 1982,  le
DCIS (Service  des  fraudes  du  departement  de  la  Defense)  a  instruit
vingt-quatre affaires concernant la societe Boeing, et en  instruit  encore
huit actuellement. Le Bureau des enquetes speciales de l'Air Force poursuit
de son cote treize enquetes du meme type."

"En novembre 1990, Boeing a ete convaincu de malversations, en  particulier
de violations de regles de securite, qui lui ont valu une  serie  d'amendes
et de sommes a rembourser totalisant 5.220.000 dollars,  et  l'interdiction
de contracter avec l'administration jusqu'en fevrier 1991. De plus Boeing a
du conclure avec l'Air Force deux compromis, en avril 1995 et en juin 1995,
en reparation de deux affaires. Ces accords ont conduit Boeing a  verser  a
l'administration pres de 66 millions de dollars de dommages et interets. En
tout, la firme a du  payer  ou  restituer  a  l'administration  161.003.450
dollars au titre d'enquetes penales, civiles ou administratives  closes  ou
en cours."

"La  plupart  des  vingt-quatre  dossiers  clos  (79%)   concernaient   des
tromperies sur des appels d'offres. La societe mere  (et  non  une  de  ses
divisions ou filiales) est impliquee dans  21  %  des  cas.  Sur  les  huit
enquetes du DCIS et les treize de l 'Air Force qui restent en cours,  38  %
et 68 %  respectivement  portent  sur  la  division  Boeing  Aerospace  and
Electronics et sur le groupe Boeing Defense and Space."

Les cadres dirigeants de la NASA pouvaient-ils ignorer tout cela lorsqu'ils
ont choisi Boeing pour controler les couts de la station spatiale ? L'un de
ces dirigeants a declare sous serment : "J'etais au  courant  de  certaines
enquetes en cours, mais seulement dans les grandes lignes; je savais que le
Departement de la Justice s'interessait a certaines activites".

Boeing n'est pas seul en cause : les principaux contractants de la  station
spatiale ont un dossier charge.  Bon  nombre  de  sous-contractants  aussi.
Comme l'a declare Dingell lors de la meme  audition  de  la  commission  du
Congres : "S'ils truandent le Departement  de  la  Defense,  pourquoi  n'en
feraient-ils pas autant avec la NASA ?"

Il semble qu'aux Etats-Unis, ce qui est encore considere ailleurs  dans  le
monde comme un comportement anormal soit devenu la norme  pour  la  plupart
des societes dans  le  domaine  aerospatial.  Le  nombre  de  condamnations
prononcees chaque annee au cours  des  cinq  dernieres  annees  depasse  le
chiffre de toute annee anterieure.  La  reduction  du  nombre  de  contrats
passes par le Pentagone dans la  periode  de  l'apres-guerre  froide  s'est
accompagnee d'une veritable vague d'escroqueries de  la  part  de  societes
pretes a tout pour decrocher des contrats.

En 1995, si l'on en croit  des  documents  de  la  NASA,  les  cinq  autres
entreprises concernees au premier chef par la station  spatiale  etaient  :
McDonnell Douglas, qui  construit  l'armature  principale  de  la  station;
Rocketdyne, qui doit fournir  les  systemes  de  production  d'electricite;
Grumman, qui doit fournir les systemes  d'integration;  Boeing  Huntsville,
qui fournira l'unite "Lab/Hab" (cellule laboratoire-habitacle); et Lockheed
qui doit fournir la logistique informatique et la maintenance d'un  element
cle achete aux Russes. Or, chacune de ces entreprises  a  un  dossier  bien
rempli. En voici le detail :

* McDonnell Douglas Corporation

Le 21 janvier 1989, la societe d'electronique McDonnell Douglas, filiale de
la maison mere, a verse 1,6 million de  dollars  a  l'administration  a  la
suite de malversations sur appel d'offres du Pentagone. Le 13 mars 1992, la
societe  d'helicopteres  McDonnell  Douglas,  autre  filiale,   versait   a
l'administration 7,5 millions de dollars a l'issue d'une affaire similaire.
Bien qu'aucune poursuite judiciaire ne s'en soit suivie, un rapport de juin
1994 du GAO (l'equivalent de notre Inspection des finances)  a  revele  que
McDonnell Douglas avait recu 129.000 dollars de la  NASA  pour  la  station
spatiale et les avait utilises, en violation des reglements, pour demarcher
des membres du Congres dans le but d'obtenir des rallonges de  credit  pour
le projet de station  spatiale.  Le  rapport  du  GAO  precisait  que  "les
factures  contiennent  la   description   detaillee   d'activites   portant
exclusivement sur des contacts avec les senateurs, les membres  du  Congres
et les equipes parlementaires". On se souvient qu'en  Allemagne,  en  1993,
des revelations similaires au sujet de  l'avion  de  reconnaissance  EGRETT
avaient provoque un enorme scandale et conduit a l'annulation du programme.

* Grumman

Le 16 mars 1991, a la suite d'une procedure administrative de  recouvrement
pour "delits divers", la societe a du verser a l'Etat  une  somme  de  2,48
millions de dollars. Le president-directeur general, John O'Brien, a  donne
sa demission la meme annee apres des revelations impliquant la  firme  dans
l'operation "Ill Wind", un scandale  au  cours  duquel  certaines  societes
auraient verse des pots-de-vin a des hauts fonctionnaires pour obtenir  des
informations confidentielles sur des contrats passes par le  Pentagone.  Le
rapport annuel 1993 de Grumman montre que la societe avait  provisionne  14
millions de dollars au  reglement  du  contentieux  "Ill  Wind".  Mais  les
procureurs federaux ont refuse  d'accepter  ce  reglement  lorsque  Grumman
tenta d'y inclure une penalite concernant une  tout  autre  affaire  -  une
surfacturation de 2,3 millions de dollars  pour  un  contrat  d'ordinateurs
passe avec la NASA.

* Rocketdyne

C'est  une  division  de  Rockwell,  constructeur  des  navettes  spatiales
americaines. Les archives de la SEC (l'equivalent de notre  Commission  des
operations de Bourse) revelent qu'en 1993, Rockwell a plaide coupable  pour
cinq delits et verse 16,5 millions de dollars d'amende a l'Etat federal  et
2 autres millions a l'Etat du Colorado  pour  avoir  notamment  deverse  de
l'eau polluee sur un site sensible pres  de  Denver.  Les  memes  documents
revelent que la societe avait ete mise en accusation en 1991 sur plainte de
l'administration pour avoir fait surfacturer  la  NASA  par  l'une  de  ses
divisions  de  l'Iowa  au  debut  des  annees  1980.  Il  fut  convenu  que
l'accusation "serait abandonnee moyennant compensation en juillet  1993"  a
la condition que cette division n'ait pas, d'ici la, "volontairement commis
des infractions aux reglements federaux en matiere d'appels d'offres". A la
suite de cette affaire, la NASA reprit ses relations contractuelles avec la
societe. Un rapport du GAO portant sur les infractions aux  appels  d'offre
du departement de la Defense decrit  deux  autres  aveux  plus  anciens  de
culpabilite par Rockwell dans des affaires de contrats publics en  1985  et
1989. Dans ces deux cas, la societe a verse en tout 5,7 millions de dollars
d'amendes et reverse 1,5 million de dollars  indument  encaisses.  La  meme
societe a verse plus de 1,2 million de dollars au gouvernement  federal  en
1989, a la suite d'une procedure de redressement administratif pour le meme
motif.

* Lockheed

En janvier  1995,  Lockheed  a  plaide  coupable  pour  avoir  corrompu  un
dignitaire egyptien afin  de  favoriser  la  vente  d'avions  de  transport
Hercules C-130. La societe a paye 21,8 millions de dollars  d'amende  et  3
millions de dollars de recouvrement administratif. La loi qui a  permis  de
poursuivre la societe Lockheed, la Foreign Corrupt Practices Act  (Loi  sur
la corruption a l'etranger), avait ete votee en 1977 a la suite d'un  autre
"scandale Lockheed", au cours duquel des sommes  avaient  ete  illegalement
versees a des officiels japonais. Ce scandale est en partie responsable  de
la chute du gouvernement Tanaka.

La plupart des principaux sous-traitants  des  societes  nommees  ci-dessus
pour la realisation de la station spatiale ont des antecedents  similaires.
Quatre  sous-traitants  de  McDonnell  Douglas  ont  un  dossier  charge  :
Lockheed, que l'on vient  d'evoquer;  Martin  Marietta,  dont  les  amendes
payees a l'administration se montent a plus de  3,9  millions  de  dollars;
Honeywell (2,7 millions); et Loral, condamnee pour infractions,  corruption
et pots-de-vin a plus de 7,7 millions d'amende. Deux des sous-traitants  de
Rocketdyne sont Lockheed et Loral.

* Boeing

Boeing est son propre sous-traitant avec Boeing Huntsville.  Cette  filiale
sous-traite elle-meme avec quatorze societes qui, pour  la  moitie  d'entre
elles, ont des antecedents : Grumman, Lockheed, Loral,  mais  aussi  Harris
Corporation, deja condamnee a des amendes et restitutions se montant a plus
de 6,8 millions de dollars; TRW (plus de 32 millions) et Allied Signal, qui
a du verser un million a la suite d'infractions commises par l'une  de  ses
filiales.

Perkin-Elmer, autre sous-traitant,  a  fabrique  le  miroir  defectueux  du
telescope Hubble. D'apres le rapport de l'Inspecteur general  de  la  NASA,
"Perkin-Elmer savait, ou aurait du savoir que le miroir ne remplissait  pas
les criteres du cahier des charges". La societe a fait classer l'affaire en
versant 25 millions  de  dollars  a  l'administration.  La  liste  pourrait
s'allonger. Ce meme Inspecteur general de la NASA, William Colvin,  est  en
effet soupconne par le GAO d'avoir  fait  prevenir  certaines  societes  en
temps utile. D'apres le GAO, "les habitudes de  M.  Colvin  en  matiere  de
notification  semblent  constituer  une  defaillance   manifeste   de   ses
responsabilites et pourraient etre considerees comme  un  obstacle  au  bon
exercice des enquetes menees par ses  services".  Avant  sa  demission,  en
septembre 1994, neuf ans apres sa  nomination  par  Ronald  Reagan,  Colvin
declara au GAO que "c'etait son habitude" d'avertir les  dirigeants  de  la
NASA d'une instruction en cours.

Interroge en mai dernier dans son bureau de Los  Angeles,  Michael  Emmick,
directeur de la Public Corruption and Government Fraud Section du  district
de Los Angeles (qui comprend la plupart des firmes de l'aerospatiale), nous
a explique : "Le vrai probleme est la course a la  production  induite  par
les exigences des clients." Les salaries percoivent le message : "Faites ce
qu'il faut ou vous serez vires." La direction est  en  general  capable  de
nier sa responsabilite personnelle, ce qui rend les poursuites  difficiles.
Si bien que nous poursuivons les societes elles-memes, en  considerant,  en
tenant pour acquis  que  la  societe  est  responsable  des  actes  de  ses
employes, qui sont la societe.

Certaines des pressions ayant conduit a ces  infractions  resultent  de  la
pratique de sous-estimation des couts previsibles :  les  entreprises  font
des offres tres basses pour obtenir le marche, puis detournent illegalement
les fonds obtenus a la faveur d'autres  contrats  gouvernementaux  afin  de
couvrir leurs depenses. Un rapport du GAO cite un responsable anonyme de la
NASA selon  lequel  "les  sous-estimations  de  devis  pratiquees  par  les
societes pour obtenir les marches sont depuis toujours un couteux  probleme
pour l'agence spatiale".

L'une des principales societes sous contrat pour la version  anterieure  de
la station Freedom est aussi l'un des  principaux  sous-traitants  d'Alpha,
McDonnell Douglas. La NASA dispose d'un formulaire, le 533, qui indique les
progres accomplis dans la realisation d'un contrat.  Selon  un  rapport  de
l'Inspecteur general de la NASA de novembre 1993, ces formulaires sont  "la
principale source d'information en matiere de depenses  des  societes  sous
contrat". Le meme rapport  indique  :  "Les  formulaires  533  remplis  par
McDonnell Douglas ne sont pas fiables". Dans  un  cas,  selon  ce  rapport,
McDonnell  Douglas  decida  unilateralement  de  reduire   de   pres   d'un
demi-milliard de dollars le devis d'un de ses propres sous-traitants  !  Le
rapport ajoute que les "responsables du Johnson Space  Center  de  la  NASA
savent pertinemment que McDonnell Douglas donne des estimations inferieures
a celles de ses sous-traitants, mais ils pensent qu'il est du ressort de la
societe sous contrat direct  (ce  qui  etait  alors  le  cas  de  McDonnell
Douglas) de presenter ses propres previsions budgetaires".

Le budget officiel de la station spatiale  est  aprement  dispute  par  les
membres  du  Congres  les  plus  opposes  au  projet,  parmi  lesquels   le
representant republicain Dick Zimmer, pour qui ce n'est qu'un trompe-l'œil.
Comme le dit un assistant du Senat : "Nous pensons que  le  chiffre  avance
est du bluff a l'etat pur. Les entreprises voulaient simplement envoyer  un
peu de materiel dans l 'espace avant les  elections  presidentielles,  pour
annoncer ensuite : "Nous avons des problemes". A ce moment-la, il  pourrait
etre trop tard pour abandonner le projet. Tandis  qu'avant,  les  problemes
restant dans l'ombre, la station spatiale en serait restee a  un  stade  de
developpement justifiant le "trop tot pour en parler". Nouvel exemple de la
"premiere loi des grands projets technologiques" de Ernest Fitzgerald.

En 1996, la NASA affirmait que le cout total de la station, y  compris  les
couts  de  fonctionnement  et  toutes  les  depenses  anterieures  a  1994,
atteindraient 72,3 milliards de dollars, en comptant les lancements  de  la
navette jusqu'en 2012. Mais le GAO, ayant recours a la  propre  methode  de
calcul de la NASA, conclut dans un  rapport  recent  a  un  chiffre  de  94
milliards de dollars pour la seule part  americaine.  La  difference  entre
72,3   et   94   est   sensiblement   superieure   au   cout   estime    du
super-collisionneur de particules enterre par  le  Congres.  S'y  ajoutent,
toujours selon le GAO, 9,4  milliards  pour  l'Agence  spatiale  europeenne
(ESA), le Japon et le Canada. Soit un total depassant le chiffre symbolique
de 100 milliards de dollars.

Le GAO avait deja critique les estimations de la NASA dans  un  rapport  de
1994  intitule  :  "Les  missions  spatiales   necessitent   des   depenses
superieures  aux  evaluations  initiales".   Le   rapport   comparait   les
estimations  initiales  aux  estimations  de  1994,  ce   pour   vingt-neuf
programmes de la NASA. L'augmentation la plus  importante  etait  de  426%.
Pour dix projets, l'augmentation des couts etait de 100% ou plus; pour onze
autres, elle etait de 50 a 99% et pour quatre encore  elle  etait  comprise
entre 14 et 50 %. Tous ces chiffres viennent en plus des reserves indiquees
dans les estimations initiales  comme  devant  couvrir  les  modifications,
problemes et retards habituels.

Par comparaison, les  depassements  de  budget  attendus  pour  la  navette
europeenne Hermes etaient de 40%. A en croire  le  responsable  du  projet,
Philippe Couillard, interroge a l'Aerospatiale  au  printemps  dernier,  la
moitie de cette hausse etait due a l'inflation du fait du prolongement  des
delais de realisation. Les principaux  motifs  indiques  par  le  GAO  pour
expliquer la maree d'augmentations des couts des  projets  NASA  sont  "les
etudes preliminaires insuffisantes,  I'instabilite  des  programmes  et  du
financement, les hypotheses trop optimistes des responsables de  programmes
et les estimations irrealistes des entreprises sous contrat".

En 1984 le projet de station spatiale avait ete estime  a  8  milliards  de
dollars "jusqu'au stade operationnel", selon les termes du directeur de  la
NASA de l'epoque, James M. Beggs. Le chiffre atteignit les environs  de  40
milliards en 1991. Un rapport recent de l'Inspecteur  general  de  la  NASA
montre que lorsque la version Freedom fut revisee pour reduire  les  couts,
en 1990, divers elements furent elimines ou repousses a un stade  ulterieur
du programme. L'instruction que la NASA donne  a  l'entreprise  responsable
pour  effectuer  des  changements  se  nomme  "change  order"   (ordre   de
modification). L'Inspecteur general indiquait : "Dans  certains  cas,  nous
n'avons pas pu identifier l'impact des suppressions  sur  les  couts  etant
donne que les negociations se faisaient par blocs". Dans un cas,  precisait
l'Inspecteur general, "malgre les 55  millions  de  dollars  d'economie  et
autres  suppressions,  I'ordre  de  modification  se  traduisit   par   une
augmentation nette de 517 millions de dollars du budget du contrat".

Voici les augmentations de prix et retards rencontres par certains  projets
de la NASA : pour le systeme de satellite Tethered, 426 % de depassement de
budget, soixante-quatre mois de retard au lancement, puis  incapacite,  une
fois en orbite, de deployer son cable de vingt-deux kilometres  au-dela  de
deux cent cinquante-six  metres;  pour  Galileo,  260%  de  depassement  et
quatre-vingt-seize mois de retard; pour le telescope spatial Hubble 172% de
depassement et soixante-dix-huit mois de retard, puis decouverte, une  fois
en orbite, du defaut qui necessita une dangereuse et  couteuse  mission  de
reparation; Mars Observer : 85% de depassement et vingt-cinq mois de retard
au lancement - a l'issue duquel la sonde se perdit dans l'espace, soit  une
perte seche d'environ un milliard de dollars.

La NASA pretend actuellement qu'elle enverra dans l'espace  les  differents
elements de la station en quarante-quatre vols repartis sur  cinquante-cinq
mois, a partir de  1998.  Vingt-huit  de  ces  vols  seront  effectues  par
navette.

La navette : moins de 50 % de fiabilite.

Selon le rapport du GAO, les retards de navette imputables a l'explosion de
Challenger n'ont concerne que neuf des vingt-neuf programmes  de  la  NASA.
Mais l'explosion de Challenger a impose une importante remise a l'etude  de
certains projets, telle la mission  Galileo.  Quelle  est  actuellement  la
probabilite d'une explosion de la  navette  ?  Les  responsables  du  CNES,
l'Agence spatiale francaise, parlent d'une chance sur soixante-dix. Ce  qui
veut dire que les  chances  d'un  vol  reussi  sont  de  soixante-neuf  sur
soixante-dix. Si l'on se tient au calendrier  actuel  de  lancement  de  la
station,  la  navette  devrait  effectuer   cinquante   vols   sans   echec
catastrophique d'ici au lancement des  composants  europeens.  En  d'autres
termes, il faut cinquante succes d'affilee. Pour calculer la probabilite de
cette eventualite,  il  suffit  de  multiplier  69/70  cinquante  fois  par
lui-meme. Malheureusement, a partir de ce calcul simple, la probabilite  de
voir se realiser cette brochette de succes est inferieure a 50  %.  Il  est
vrai que la probabilite avancee par le CNES d'une explosion de  la  navette
(une sur soixante-dix) est legerement plus pessimiste que celle que la NASA
elle-meme  avait  calculee  en  1989  a  propos  de  la  mission   Galileo,
c'est-a-dire une sur soixante-dix-huit.

Certains  enqueteurs  du  GAO   expriment   discretement   leurs   craintes
grandissantes quant  a  la  securite  de  la  flottille  vieillissante  des
navettes. Un rapport de l'Inspecteur general de la NASA de  septembre  1994
vaut d'etre cite : "L'insuffisance des processus de controle de qualite des
entreprises contractantes ont contribue aux defaillances de la navette.  La
NASA depense chaque annee plus de 43 millions de dollars  pour  reparer  du
materiel ne fonctionnant pas ou mal et/ou ne correspondant  pas  au  cahier
des charges. (...) De plus, des problemes  de  ce  type  sont  restes  sans
solution pendant de longues periodes. (...) Des materiels  que  la  NASA  a
accepte de ses fournisseurs sont defaillants en  raison  de  leur  mauvaise
qualite.  Ni  le  programme  d'assurance  qualite  du  contractant  ni   la
surveillance exercee  par  l'administration  sur  le  controle  de  qualite
effectue n'a su detecter ni prevenir  les  evenements  ayant  entraine  des
defaillances. La qualite insuffisante des produits fournis a accru le  cout
des programmes de navette  et  a  eu  des  repercussions  nefastes  sur  le
calendrier des missions".

L'Inspecteur general cite une longue liste d'exemples, tel celui-ci,  reste
sans solution pendant pres de  trois  ans  :  "Un  tube  d'armature  d'aile
endommage a ete decouvert dans l'aile droite de l'OV-103, apres le  STS-31.
Manifestement, les dommages se sont produits dans une zone  ou  l'epaisseur
de la paroi du tube etait tres inferieure a ce qu'indiquait le  cahier  des
charges. Les variations d'epaisseur de la paroi resultaient de processus de
controle inadequats de la part de Grumman, sous-traitant de Rockwell."

La propre commission consultative de securite aerospatiale  de  la  NASA  a
emis un vif avertissement au sujet de la securite  des  navettes  dans  son
rapport de 1995, et l'a rappele dans celui de 1996. La  commission  prenait
note du fait que  l'un  des  principaux  sous-contractants  de  la  navette
elle-meme, Lockheed, avait supprime plus de mille deux  cents  emplois.  La
plupart etaient imputables a une reduction normale des effectifs et  a  des
incitations financieres au depart, mais 22% des salaries concernes  avaient
ete purement et simplement licencies. La commission de securite  remarquait
qu'"une reduction similaire est prevue d'ici a la fin  de  l'annee  fiscale
1996. (...) Il faut en conclure que des  reductions  d'effectifs  de  cette
ampleur ne peuvent etre consenties sans accroitre le risque de nuire  a  la
securite. " Le 19 mai 1996, Daniel Goldin, le patron de  la  NASA,  declara
que l'agence supprimerait trois mille  cent  cinquante  emplois  au  Centre
spatial Kennedy, dans le cadre du plan de suppression de  vingt-neuf  mille
emplois dans l'agence et chez ses fournisseurs.


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